vendredi 10 juillet 2009

J moins tout le reste

Comme tous les ans depuis vingt ans, c’est le premier jour.
Qui, forcement, n’est pas le premier.

Le premier jour, cela veut dire, entre autres, que les affiches en quatre couleurs fluos dessinées par Michel Quarez s’étalent sur des colonnes Morris, sur des drapeaux, sur des mâts, dans la rue, dans le métro, par centaines. Que près de 70 000 tracts annonçant les spectacles vont passer de main de main.
Que 100 000 programmes ont été imprimés et
25 000 envoyés.

Qu’on s’apprête à donner 132 représentations dans 33 lieux différents, du Palais Royal au mail de Champigny, du parc de Belleville au musée du quai Branly, en passant par les arènes de Lutèce, le square des Amandiers, l’église Saint-Eustache. Soit 47 spectacles, soit 233 artistes – chanteurs, danseurs, acteurs, acrobates, musiciens –, venus de New York, de Saint-Jacques de la Lande, de Tel-Aviv, de Johannesburg, de Séville, d’Anvers, de La Havane. Donc qu’on a repéré des lieux, coordonné des chambres d’hôtel et des billets d’avion, prévu puis changé des dates, eu des déceptions, des sueurs froides, des petits triomphes.


Que les vingt agents d’accueil ont été eux-mêmes accueillis, jeudi dernier, dans les bureaux du festival. Que cette année, ils seront sapés comme des milords, avec des vêtements prêtés par Coming Soon, déclinaison urbaine et chic de Yohji Yamamoto.
Élégance légère assortie d’une lourde responsabilité : ce beau linge, qui doit être rendu nickel, est à laver à froid et avec d’infinies précautions. Le prix moyen de chaque tenue correspond à peu près à 50 heures du salaire d’un agent d’accueil. À ce tarif, tout le monde flippe un peu des pantalons blancs – inquiétude finalement dissipée dans l’effervescence des essayages.



Le premier jour, cela veut dire aussi qu’à peine débarqués de leur avion, les New-Yorkais Dean Wareham et Britta Phillips sont allés hier faire la balance du son quatre heures plus tôt que prévu, peut-être pour mieux profiter de Paris le 14 juillet.
Que pour leur spectacle 13 Most Beautiful Songs for Andy Warhol’s Screen Tests, on a installé ce matin 200 mètres carrés de tapis d’Orient à l’église Saint Eustache. Tapis qu’il a fallu trouver en catastrophe après qu’un premier prestataire a fait faux-bond peu avant le spectacle. Finalement loués – à un prix compassionnel – par Félix Nataf, à mille miles de la mauvaise réputation faite aux marchands de tapis. Étalant par terre ses trésors, il conseille de patchworker les kilims avec quelques gabbeh aux couleurs vives “parce que si c’est pour du Warhol, il faut que ça flashe. Mais surtout, faites comme vous voulez. Ces tapis viennent d’Afghanistan, d’Iran, de pays où la liberté est souvent malmenée, alors sentez-vous libres de les utiliser comme bon vous semble.”

Que pendant qu’on posait les tapis, Robyn Orlin et les dix chanteurs de la chorale des Phuphuma Love Minus répétaient Imfihlakalo Yezulu, concert-promenade dans les jardins du musée du quai Branly.

Que leur spectacle commence à 16 h, et qu’on a les yeux tournés vers le ciel et la veille météo au bout du fil. Prévisions pour le moment : 25 degrés, éclaircies, vent soufflant sud-ouest à 17km/heure.

Que demain les dix joueurs de tavoul et les dix joueurs de zourna des Bohèmes de Thrace seront au Luxembourg, que le cirque va entrer en piste à la Cité Internationale, et que la “boîte de jour” nomade des Cocktail designers fera escale à Vitry.

C’est le premier jour : tout est fait et rien n’est joué.

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